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  • 11 novembre « fête de la consommation » !

    En entendant, aujourd’hui, sur la radio RTS, évoquer la date du 11 novembre comme étant une date particulière, je m’attendais que le propos nous conduise vers l’armistice de la Première Guerre mondiale. C’est en effet le 11 novembre 1918, dans un wagon-restaurant provenant du train d’état-major du maréchal Foch, stationné dans une clairière de la forêt de Compiègne, que fut signé l’armistice qui mit fin aux combats de cette terrible guerre qui a fait près de 20 millions de morts, d’invalides ou de mutilés.

    A cet égard, je ne peux m’empêcher d’aller lire les noms sur les monuments aux morts en France, jusque dans les plus petits villages. Les longues listes de disparus, avec parfois un nom de famille, cité avec une occurrence qui défie toute imagination, nous permettent de prendre la mesure de ce que fut cette guerre, qualifiée de « guerre totale » !

    Ces listes de morts, gravées dans le marbre de ces monuments au cœur des villes et villages de France me mettent toujours dans un état de sidération. Que de souffrances et de deuils ! Que de familles meurtries ! Que d’orphelins et de veuves sur tous les continents !

    Dans toutes les capitales européennes (et villes et villages), la population, en apprenant qu’un armistice était signé entre les alliés et les Allemands, exprime son soulagement. A Paris, plus d’un million de personnes descendent dans la rue pour célébrer cet armistice. Même en Allemagne, pourtant vaincue, et qui va signer une abdication aux conditions humiliantes pour elle, la population berlinoise manifeste sa joie dans les rues pour cet armistice qui signifie la fin des souffrances. Dans la Presse du monde entier, l’événement occupe la « Une » des journaux comme dans le New-York Times du 11 novembre 1918.

    Cette Grande Guerre a ravagé la population mondiale (population qui verra encore sa mortalité drastiquement augmenter au sortir de ce conflit, puisque les assauts de la grippe espagnole, répandue en pandémie dès 1918, feront presque autant de victimes que la Première guerre !). Rappelons que la Première Guerre est un tsunami géopolitique mondial où vont se mettre en place de nouveaux états et centres d’influences politiques. En effet, c’est bien la Première Guerre mondiale qui va entrainer la chute des empires allemand, russe, austro-hongrois et ottoman, un remaniement de frontières, de souverainetés et la formation de nouveaux états en Europe et au Moyen Orient. Et, sans le savoir encore, des conditions de paix (fixées définitivement dans le traité de Versailles du 28 juin 1919) qui mettent en germe des insatisfactions et ressentiments qui, d’après de nombreux historiens, joueront un rôle non négligeable dans l’éclatement de la Seconde Guerre mondiale !

    Ce succinct récit nous rappelle que le 11 novembre est une date capitale dans l’histoire mondiale. En France, les commémorations ont lieu à Paris où Macron inaugure un monument dédié aux soldats morts hors de France.

    Mais, en Suisse, pas un mot sur cette date historique sur les ondes radiophoniques ! Les seules informations que j’ai entendues sont que le 11 novembre est la « fête des célibataires », qui est célébrée en faisant de cette journée, la « journée internationale de la consommation ». Cette fête prendrait son origine en Chine, car (si j’ai bien compris) le 11.11 (11ème jour du 11ème mois), les 1 symboliseraient l’individu seul, pas encore marié ! En tout cas, du point de vue markéting, ça marche !

    Cette fête de la consommation voit une ruée des ventes en ligne. Le 11 novembre, sur le site Alibaba (la plus grande plateforme de commerce en ligne du monde), plus de 300'000 commandes sont enregistrées à la seconde !

    Se retrancher dans son “cocooning”, bouffer des chips (ou se faire livrer avec « Uber Eats » ses plats préférés) tout en commandant en ligne le plus de produits possible, est une passion contemporaine. Cette activité nous permet de rester au chaud et d’oublier toutes les tragédies humaines dont celle des tranchées où tant de poilus vivaient l’horreur dans l’attente de la mort.

    Décidément, nous vivons une période formidable, dans un monde merveilleux ! Consommons, consommons, consommons…

  • Ouverture à l’Autre et reniement de soi !!!

    Les membres du Conseil municipal en Ville de Genève ont reçu une invitation au cimetière des Rois pour participer, aujourd’hui (ce samedi 2 novembre), à « la présentation de la tradition de la "Fiesta de Dia de Muertos" » ainsi qu’à la réception qui suivra.

    Cet événement suscite de nombreuses réactions dont l’excellente Lettre du jour du Courrier des lecteurs (in TdG du 28 octobre 2019) « Fête mexicaine conviée aux Rois », rédigée par Isabelle Brunier. Cette historienne dénonce l’effet pervers de ces fêtes imposées par les autorités de la Ville de Genève qui est « d’implanter dans des lieux généralement dédiés au silence, à la contemplation, au recueillement et d’en faire des lieux de fiestas obligatoires ».

    Madame Brunier a raison ! Comment nos autorités ont-elles pu prendre une décision aussi ahurissante d’organiser cette fête à l’issue de laquelle un buffet de petits canapés, biscuits et boisson sera offert aux participants ?

    Rappelons, en effet, que le 2 novembre, pour l’Eglise catholique, est la date de la commémoration des fidèles défunts. Ce jour est traditionnellement consacré à une visite familiale au cimetière, à l’entretien et au fleurissement des tombes où les chrétiens viennent pour prier et, dans nos contrées, se recueillir. Or, le cimetière des Rois a beau être implanté dans la Mecque du Protestantisme (où se trouve d’ailleurs la tombe de Calvin), de nombreux défunts enterrés dans ce cimetière sont des catholiques dont les familles viendront peut-être se recueillir durant la fête des morts.

    Que cette commémoration, ce jour de prière et d’espérance puissent prendre des formes différentes suivant les pays, cela est admirable et montre combien l’Eglise catholique a su s’adapter au milieu culturel où elle a prospéré. En effet, les origines de la fête des Morts au Mexique ("Fiesta de Dia de Muertos") où les familles viennent danser, manger, festoyer sur les tombes des défunts, pour réunir morts et vivants, remontent à la civilisation des Aztèques. Nul doute que cette fête, classée par l’UNESCO dans la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, peut avoir le pouvoir de questionner le rapport que nous entretenons, nous-mêmes, avec la mort, et qu’un dialogue entre cultures est un enrichissement précieux. Que nos autorités veuillent sensibiliser la population genevoise au rite des Mexicains pour célébrer leurs morts est une idée noble. L’ouverture à l’Autre, n’est-elle pas assurément un ferment pour la paix sociale ?

    En revanche, implanter cette fête dans un cimetière genevois, et le cimetière le plus emblématique de Genève, le cimetière des Rois, est un manque de discernement affligeant, un manque de respect pour la population genevoise et une faute inexcusable.

    La présentation de cette tradition mexicaine aurait pu être faite dans un autre lieu “laïc”, dans la salle communale de Plainpalais ou en plein air dans un de nos nombreux parcs en Ville de Genève.

    A cet égard, ce n’est pas la première fois que nos autorités, au nom du multiculturalisme, du “vivre ensemble” font ce genre de bévue ! Rappelons-nous, par exemple, que la viande de porc avait été supprimée dans certains restaurants scolaires en Ville de Genève, au nom du respect des élèves musulmans ! Cette interdiction, suite à l’intervention et à l’indignation de conseillers municipaux a été levée, il est vrai, par la conseillère administrative en charge du parascolaire.

    Genève a une longue tradition d’accueil d’étrangers et de cultures qui parviennent à vivre en harmonie. Si nous voulons que notre Ville puisse poursuivre sa mission, évitons de renier nos traditions et nos racines culturelles. Ce n’est pas en se reniant que l’on accepte l’Autre. Le commandement dans l’Evangile : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » reste d’une actualité indépassable et universelle.

    Que nos autorités s’en souviennent !

     

    Nota bene : puis-je suggérer à ceux qui, ce soir, éprouveront une envie irrépressible de danser sur une tombe, de choisir la tombe de Calvin, manière de faire un petit pied de nez à celui qui, dans ses Ordonnances, avait interdit la danse à Genève ?

    Enfin, pour ceux qui voudront rendre un bel hommage à deux belles figures de Genève, je leur suggère d’aller fleurir la tombe de notre poétesse Simone Rapin et celle de notre philosophe Jeanne Hersch. Deux femmes admirables qui ont su honorer Genève !