Ouverture à l’Autre et reniement de soi !!!
Les membres du Conseil municipal en Ville de Genève ont reçu une invitation au cimetière des Rois pour participer, aujourd’hui (ce samedi 2 novembre), à « la présentation de la tradition de la "Fiesta de Dia de Muertos" » ainsi qu’à la réception qui suivra.
Cet événement suscite de nombreuses réactions dont l’excellente Lettre du jour du Courrier des lecteurs (in TdG du 28 octobre 2019) « Fête mexicaine conviée aux Rois », rédigée par Isabelle Brunier. Cette historienne dénonce l’effet pervers de ces fêtes imposées par les autorités de la Ville de Genève qui est « d’implanter dans des lieux généralement dédiés au silence, à la contemplation, au recueillement et d’en faire des lieux de fiestas obligatoires ».
Madame Brunier a raison ! Comment nos autorités ont-elles pu prendre une décision aussi ahurissante d’organiser cette fête à l’issue de laquelle un buffet de petits canapés, biscuits et boisson sera offert aux participants ?
Rappelons, en effet, que le 2 novembre, pour l’Eglise catholique, est la date de la commémoration des fidèles défunts. Ce jour est traditionnellement consacré à une visite familiale au cimetière, à l’entretien et au fleurissement des tombes où les chrétiens viennent pour prier et, dans nos contrées, se recueillir. Or, le cimetière des Rois a beau être implanté dans la Mecque du Protestantisme (où se trouve d’ailleurs la tombe de Calvin), de nombreux défunts enterrés dans ce cimetière sont des catholiques dont les familles viendront peut-être se recueillir durant la fête des morts.
Que cette commémoration, ce jour de prière et d’espérance puissent prendre des formes différentes suivant les pays, cela est admirable et montre combien l’Eglise catholique a su s’adapter au milieu culturel où elle a prospéré. En effet, les origines de la fête des Morts au Mexique ("Fiesta de Dia de Muertos") où les familles viennent danser, manger, festoyer sur les tombes des défunts, pour réunir morts et vivants, remontent à la civilisation des Aztèques. Nul doute que cette fête, classée par l’UNESCO dans la liste du patrimoine culturel immatériel de l’humanité, peut avoir le pouvoir de questionner le rapport que nous entretenons, nous-mêmes, avec la mort, et qu’un dialogue entre cultures est un enrichissement précieux. Que nos autorités veuillent sensibiliser la population genevoise au rite des Mexicains pour célébrer leurs morts est une idée noble. L’ouverture à l’Autre, n’est-elle pas assurément un ferment pour la paix sociale ?
En revanche, implanter cette fête dans un cimetière genevois, et le cimetière le plus emblématique de Genève, le cimetière des Rois, est un manque de discernement affligeant, un manque de respect pour la population genevoise et une faute inexcusable.
La présentation de cette tradition mexicaine aurait pu être faite dans un autre lieu “laïc”, dans la salle communale de Plainpalais ou en plein air dans un de nos nombreux parcs en Ville de Genève.
A cet égard, ce n’est pas la première fois que nos autorités, au nom du multiculturalisme, du “vivre ensemble” font ce genre de bévue ! Rappelons-nous, par exemple, que la viande de porc avait été supprimée dans certains restaurants scolaires en Ville de Genève, au nom du respect des élèves musulmans ! Cette interdiction, suite à l’intervention et à l’indignation de conseillers municipaux a été levée, il est vrai, par la conseillère administrative en charge du parascolaire.
Genève a une longue tradition d’accueil d’étrangers et de cultures qui parviennent à vivre en harmonie. Si nous voulons que notre Ville puisse poursuivre sa mission, évitons de renier nos traditions et nos racines culturelles. Ce n’est pas en se reniant que l’on accepte l’Autre. Le commandement dans l’Evangile : « Tu aimeras ton prochain comme toi-même » reste d’une actualité indépassable et universelle.
Que nos autorités s’en souviennent !
Nota bene : puis-je suggérer à ceux qui, ce soir, éprouveront une envie irrépressible de danser sur une tombe, de choisir la tombe de Calvin, manière de faire un petit pied de nez à celui qui, dans ses Ordonnances, avait interdit la danse à Genève ?
Enfin, pour ceux qui voudront rendre un bel hommage à deux belles figures de Genève, je leur suggère d’aller fleurir la tombe de notre poétesse Simone Rapin et celle de notre philosophe Jeanne Hersch. Deux femmes admirables qui ont su honorer Genève !