« Un original ne vaut rien sans une copie ! »
Il y a des jours où des moments de grâce illuminent nos existences, ces moments suspendus où toute une scène du monde se découvre dans des paysages ou récits inédits. Ce bonheur, je l’ai vécu en allant au Centre d’Art Contemporain à Genève, contempler les œuvres de Miroslav Marsalek.
Une exposition à voir absolument (jusqu’au 8 novembre).
Cet artiste atypique, d’origine tchèque, tient du “Brave Soldat Chvéïk”. Même refus d’être embrigadé !
Miroslav Marsalek - Mirek - comme les artistes de la Renaissance, pratique l’étude anatomique, naturaliste et la calligraphie dans ses dessins et esquisses où il sublime le réel sans prétention ni forfanterie. Car, pour lui, « surtout pas d’originalité… puisqu’un original ne vaut rien sans une copie ! » Cet artiste saute par dessus les genres, les siècles, les modes avec une légèreté jubilatoire.
Tout comme le poète Francis Ponge, qui ne voulait pas faire de poésie, mais “simplement” décrire un objet, « le Savon », par exemple, « qui a beaucoup à dire », Mirek dessine et écrit en s’inspirant du quotidien : des objets ou des gens rencontrés dans des bistrots, des bus. Ses textes, mêlés à ses esquisses et bandes dessinées, échappent à toute classification (poème, rêverie, description, recette culinaire, réflexion philosophique, autodérision…), et nous transportent dans un imaginaire surprenant, cruel, tendre voire philosophique.
Mirek ne demande pas d’être pris au sérieux, car « tout le monde peut être un artiste sauf moi », mais, avec son regard qui a conservé l’étonnement de l’enfance, il construit un univers fascinant. « Le chaos et moi qui le représente avec autant d’application » écrit-il.
Autre singularité de Mirek : sa capacité à faire des (auto)portraits d’une main en faisant avec l’autre une activité prosaïque : se laver les dents ou vous brosser les chaussures en vous installant sur la chaise qu’il a construite comme une machine de Léonard de Vinci.
Futile, risible, ludique, rêve d’ubiquité ou d’ambidextrie ? Peut-être, mais la démarche n’est pas gratuite. Mirek veut préserver le geste d’une volonté trop analytique pour permettre à son tracé un mouvement qui ose se perdre pour mieux se retrouver.
Alors, n’hésitez pas d’aller au Centre d’Art Contemporain à Genève, voir l’exposition de Miroslav Marsalek (au 4ème étage).
Et si ces œuvres vous émeuvent, et que vous vous voulez poursuivre l’aventure, sachez que le directeur du centre, M. Andrea Bellini, à qui l’on doit la découverte de Mirek pour avoir su, un jour, descendre de sa selle de vélo à Plainpalais, va ouvrir des ateliers de calligraphie et de dessin avec Miroslav Marsalek : « Dessiner comme Mirek ». Ces cours seront ouverts à tous, enfants et adultes, à partir de 12 ans.
Histoire à suivre... et sans retenue !