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Monsieur Beer défend le SRED !

Dans une conférence de presse donnée hier, Monsieur Beer ,  nous rapporte la Tribune de Genève, « a fait l’apologie du SRED » (Service de la Recherche en éducation de l’Etat de Genève). 

Le contraire eut été étonnant, car ce Service est la boîte de résonance que le patron de l’instruction publique secoue depuis des années à sa convenance.

La recherche en éducation est chose délicate. Mais, cette difficulté ne semble pas effleurer le magistrat en charge de l’éducation, qui, avec sa terminologie, compare, la recherche en éducation au « tableau de bord d’une voiture », indispensable pour « piloter un système éducatif » !

Toute une vision !

Bon, on peut pardonner au chef du DIP sa mauvaise métaphore (qui envahit le monde scolaire !). Peut-être était-il déjà dans l’ambiance du Salon de l’auto qui ouvre ses portes à Genève ?

Car, enfin, en éducation, si on a les yeux rivés sur des cadrans, on risque fort d’aller droit dans le mur.

L’éducation, faut-il le rappeler, est toujours affaire de valeurs. Un régime qui veut dominer sa population n’utilisera ni les mêmes méthodes pédagogiques ni les mêmes disciplines scolaires que celui qui veut former une jeunesse responsable.

Ainsi, privilégier à l’école l’histoire, l’apprentissage des langues, les disciplines scientifiques ou vouloir supprimer le latin, par exemple, n’est en aucun cas anodin.

Par conséquent, les chiffres et statistiques dans la recherche en éducation (sauf les statistiques pour prévoir les effectifs d’élèves) ne disent rien ou peuvent tout dire !

Car, ces données doivent être interprétées à l’aune de la grille de lecture du chercheur, qui, elle, dépend de ses convictions, de ses valeurs morales ou encore de coercitions politiques.

A cet égard, ce qui pose doublement problème avec le SRED, c’est qu’il est un service de recherche en éducation (avec les paradoxes de ce champ de recherche), mais qui plus est, de l’Etat, c’est-à-dire soumis au magistrat en charge de l’éducation et aux options politiques de ce dernier.

Facile ainsi pour un élu d’utiliser ce service pour défendre ses projets et réformes. C’est de bonne guerre !

Tous les conseilleurs d’Etat en charge de l’éducation ont sans doute été tentés d’utiliser le SRED pour appuyer leur politique scolaire, sauf que, l’élu actuel en a fait une pratique constante et abusive.

Il faut lire les rapports du SRED pour voir combien les chercheurs ne sont pas dupes de l’exploitation faite de leurs travaux (mais qui les lit ???), et qu’ils tentent de séparer les assertions tirées de leurs propres recherches et de recherches citées, de celles défendues par le magistrat en charge de l’éducation…

Mais ce mélange des propos délégitime leurs travaux et finit même par affecter l’ambiance au sein de ce service.

Ayant eu l’occasion de rencontrer dans des congrès ou colloques des collaborateurs du SRED (j’utilise intentionnellement le mot “collaborateur”, car leur rôle s’est réduit à devenir effectivement les collaborateurs du pouvoir), je me souviens que l’un m’a dit un jour sur un ton déprimé ou désabusé : « ça fait plusieurs années qu’on ne peut plus faire de la recherche, car on est au service du prince » !

Ce n’est donc pas un hasard si la fermeture de ce service bien lisse, bien huilé, est envisagée par le législatif.

Car, même si, avec la nouvelle législature, un nouveau chef du DIP sera bientôt élu, et qu’il n’exercera peut-être pas une main mise sur ce service qui pourrait retrouver une nouvelle dynamique et réhabiliter le débat en matière scolaire (quitte à inquiéter un peu le pouvoir...), néanmoins, des questions demeurent :

-       quel est le réel bénéfice de ce service ;

-       est-il vraiment profitable et indispensable à l’école genevoise (pour évaluer les effectifs des élèves en vue de l’organisation des classes, un statisticien rattaché à la direction du DIP suffirait) ;

-       quel est son coût de fonctionnement (et donc les économies faites, si fermeture il y avait) ;

-       quels seraient les locaux libérés ;

-       ne serait-il pas plus judicieux que la recherche en éducation soit intégrée au monde universitaire, en l’occurrence à l’Université de Genève à la Faculté de Psychologie et des Sciences de l’éducation. Même si cette dernière n’est pas réputée pour être si indépendante envers le pouvoir (et c’est un euphémisme !!!), la recherche en éducation ne gagnerait-elle pas en légitimité en étant rattachée au monde universitaire ?

On l’aura compris, je ne suis, bien évidemment, pas pour la suppression de la recherche en éducation, mais plutôt pour que cette dernière puisse être menée dans des conditions optimales (un peu moins proche du pouvoir).

Assurément, s’il faut faire des coupes budgétaires, la fermeture du SRED serait peut-être moins douloureuse que des coupes de subventions dans des théâtres genevois.

Par ailleurs, celle-ci pourrait se faire en douceur…  Plusieurs collaborateurs du SRED sont proches de la retraite, quant aux autres psychologues, sociologues… ils pourraient rebondir à l’Université.

Bien sûr, Monsieur Beer défendra bec et ongles la survie du SRED.

Il faut dire que notre ami s’est toujours montré très reconnaissant envers ceux qui l’ont servi…

 

 

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